Avec la disparition de Pelé, le clan des champions de légende se réduit encore. Ils sont rares désormais les survivants à pouvoir se réclamer de l’Histoire du sport. Eddy Merckx et Giacomo Agostini. Lewis Hamilton, Valentino Rossi et le malheureux Michael Schumacher.

Il a quitté les stades et la vie tout en s’assurant l’immortalité des grands champions. Le roi Pelé n’est plus. Du haut de ses trois Coupes du Monde et de ses 1303 buts marqués en 1392 matches il peut toiser les générations de jeunes prodiges que les médias veulent régulièrement lui comparer. A l’instar d’Eddy Merckx ou de Fausto Coppi, Pelé n’est pourtant comparable à personne. Seul au Monde ainsi que l’affirmait son ami Muhammad Ali. Il aura illuminé le sport de sa classe innée, de sa capacité romantique d’improvisation, de son sourire et de ses larmes aussi. Au point de dépasser son sport. Comme avant lui le Campionissimo Coppi. Tous deux d’une race à part. Tous deux échappant aux commentaires oiseux de spécialistes de l’instant d’après. Tous deux mythiques déjà de leur vivant.

Dans cet Olympe des Champions hors catégorie, et hors contexte numérique, Pelé figurera désormais aux côtés de Diego Maradona, Jim Clark, Mike Hailwood, Ayrton Senna, Jarno Saarinen et quelques cyclistes inoubliables. De Jacques Anquetil à Miguel Indurain, Bernard Hinault ou Jeannie Longo.

En une époque prolixe en superlatifs aussi vains qu’excessifs, la liste peut sembler maigre. Elle n’est pourtant que le reflet d’une vérité absolue. Celle qui veut que la règle d’entrée à l’Olympe ne soit pas seulement liée au palmarès mais aussi et surtout à la personnalité et à la capacité du champion de dépasser sa discipline et ses contemporains pour édifier une œuvre plus qu’une banale carrière.

Il y a ainsi entre Pelé, Merckx et leurs contemporains autant de différence qu’entre Leonard de Vinci, Bob Dylan et leurs contradicteurs à la mode. Ces athlètes sublimes, fruits d’une alchimie surhumaine littéralement extra-terrestre, se situent à des années lumières de l’actualité. Tels Dante, Molière, Mozart ou Le Corbusier.

Évoquer alors le Crépuscule des Dieux n’est pas un constat mais une métaphore biblique à l’usage des incroyants. Puisse Merckx leur apporter cette dose de mysticisme mélancolique qui leur fait si cruellement défaut.