Vintage, vous avez dit vintage ?

De l’insigne différence entre apologie du modernisme vain et chanson de geste mélancolique, du désir de renouer avec l’authentique (voire le « lotentique » cher à Marcel Pagnol), de la toute passion de nombreux cyclistes ou passionnés de cyclisme à retrouver la dimension humaine voire humaniste dans l’objet vélo, est née une nouvelle vague émotionnelle autour de la notion de Vintage.

Nouvelle vague et non pas nouvelle mode. Car le phénomène apparaît désormais profondément ancré dans le quotidien rêvé ou vécu de nombreux adeptes actuels de la petite reine. Il n’y a pour s’en convaincre qu’à constater la hausse exponentielle de la cote des machines anciennes. Avec en première ligne les marques mythiques françaises ou italiennes. De Peugeot et Mercier à Legnano et Bianchi, de Colnago à De Rosa, Masi ou Pinarello. Et un peu plus vintage encore, les La Perle, La Captivante, Génial Lucifer, Stella, Alex Singer ou René Herse. Liste non exhaustive évidemment, tant du côté français que du côté italien.

À ces génies fondateurs et souvent rebelles, on peut rajouter les British de Raleigh et quelques-autres, dont les Suédois de Monark. De quoi alimenter les chroniques et les débats, de quoi surtout permettre à des passionnés sans cesse plus nombreux de participer aux épreuves de type Eroica qui fleurissent désormais partout en Europe. Avec en première ligne des bataillons d’esthètes et de rebelles qui prétendent avec humour et poésie rechercher l’autre voie chère par exemple au génial Gérard Vroomen. Sauf que chez eux, autre piste est synonyme de autres temps. Et de retour aux sources du cyclisme par l’utilisation au jour le jour de vélos anciens restaurés, souvent admirablement, et la participation aux épreuves dédiées à ces vélos suivant des règles drastiques. Pas de pédales automatiques et pas de câbles et gaines intégrés dans les poignées. Exit donc les vénérables poignées Gran Compé ou les premières pédales Look et Time…

La question qui se pose alors est la durée d’extension de cette nouvelle vague vintage. Culturellement et commercialement. Une question qui offre plusieurs alternatives de réponses. Toutes largement optimistes. Car plusieurs constructeurs, et non des moindres, ont compris la demande des passionnés et donc du marché. Et ils ont maintenu ou réintroduit à leurs catalogues des machines vintage d’esprit mais montées avec des composants actuels. De Rosa avec ses modèles Nuovo Classico et Agé, Colnago avec son légendaire Master, Cinelli avec son Supercorsa, Passoni avec son Lightsteel, Victoire avec son Ventoux Veloce, Jaegher avec son Interceptor, connaissent tous un succès grandissant. La résultante d’une double adéquation entre retour aux sources et réponse romantique au désir d’authenticité et de singularité d’un nombre sans cesse croissant de cyclistes qui érigent en icônes Jacques Anquetil et Fausto Coppi.

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